
« Fermez les yeux ; vous êtes en 2007 ! », vociférait Jérôme Rocipon, chanteur du duo #numéro qu’il formait avec le producteur Pierre Crube, invités spéciaux du groupe Omnikrom qui ouvrait cette soirée flairant bon la nostalgie et les grosses pétarades électro. Quel prétexte ? Souligner le vingtième anniversaire du groupe électro-rap français TTC dont l’influence sur la scène musicale québécoise se mesure encore aujourd’hui. Évidemment, le complice Poirier aussi était de la fête au MTelus, déterrant même du fond d’un tiroir un vieux t-shirt de ses défuntes soirées Bounce le gros.
En rétrospective et considérant la frilosité de notre paysage radiophonique, qu’un ovni musical tel que TTC ait réussi à se poser chez nous il y a une douzaine d’années tient presque du miracle. La preuve, aussi, quelque part, que nos terres étaient prêtes à se faire labourer par leur alliage de rap et de musiques de club, une idée aujourd’hui courante dans la musique populaire, mais nettement plus visionnaire à l’époque.
TTC faisait alors la démonstration que les publics de hip hop et de musiques électroniques dansantes étaient compatibles, et surtout que ces deux genres musicaux distincts gagneraient à se rapprocher, une idée bien saisie par Omnikrom et Poirier, alliés québécois naturels du quatuor français. Ensemble, ils ont fait époque sur la scène underground québécoise de la seconde moitié des années 2000, générant une poignée de chansons emblématiques dont Danse la Poutine (Omnikrom feat. TTC), Chewing-gum fraise (#numéro feat. Omnikrom) et Pour te réchauffer (Poirier feat. Omnikrom TTC). De vraies bombes, que la foule chantait encore par coeur hier soir.
Reste que l’organisation des Francos a eu les oreilles plus grandes que la panse : les nostalgiques n’étaient pas nombreux hier soir au MTelus, décidément trop grand pour ces célébrations qui auraient sans doute été plus torrides au Club Soda, disons. Le balcon était désert, le bar du fond clairsemé, mais le parterre honorablement bondé – entre autres par un type simplement vêtu de ses espadrilles et d’un maillot style Speedo qui ne refusait aucun selfie. Bref, ce n’était pas la foule de U2 la veille, mais y’avait de l’ambiance.
C’est donc à Omnikrom — les MC Jeanbart et Linso Gabbo, secondés par le DJ/producteur Figure8 – qu’on a confié la tâche d’ouvrir le bal. Disposant de quarante-cinq minutes, le trio a enchaîné les mémorables de ses deux albums et deux EPs, avec la même bonhomie qui avait contribué à leur succès au milieu des années 2000. Backstage, Été hit, Prends une photo avec moi, Laisse aller tes fesses, Achète-moi, Casquettes de géants, le tout nappé d’épaisses couches de basses fréquences et de croustillantes rafales de boîtes à rythmes, des arrangements qui finalement semblaient avoir assez bien vieillis. #numéro est enfin venu les retrouver, mais s’est fait couper le sifflet à la consternation générale alors qu’ils entamaient leur plus gros succès, Chewing gum fraise. Bouh ! Heureusement, les fans ont pu l’apprécier intégralement quelques heures plus tard, lorsque TTC a pris le contrôle de la nuit, de 23 h 30 à la fermeture réglementaire des bars.
Poirier a ensuite offert un savoureux set anthologique, complètement différent du type d’ambiance afro-dancehall-soca qu’il propose désormais dans les soirées Qualité de luxe qu’il anime avec ses collègues Kyou et Mr. Touré au Ausgang, rue Saint-Hubert. Le compositeur et DJ est ainsi remonté à ses premières productions hip hop abrasives, enfilant entre ses compositions ses propres remixes de succès populaires de M.I.A. et Rihanna (entre autres), nous menant ensuite à sa période dancehall, puis créole, jusqu’à nous faire entendre quelques nouveautés traversées par l’influence des musiques de club du continent africain. Soixante-et-quinze minutes bien serrées, expertement déployées, et visiblement appréciées par les danseurs.
Les trois heures suivantes appartenaient à TTC : Cuizinier d’abord, qui s’est annoncé au micro en reprenant une chanson de son mémorable premier mixtape, Pour les filles vol.1 (2005), puis passant à la console pour tricoter un set de hip hop américain et français des vingt dernières années. Tido Berman a fait de même, comme son comparse Teki Latex qui, depuis la mise en veilleuse de TTC, a co-fondé le label électro Sound Pellegrino avec le DJ du groupe, Orgasmik. Ça a rapidement dérapé en partouze : alternant entre performances au micro et DJ sets, le quatuor français a invité Poirier, Omnikrom et #numéro à chauffer les planches avec leurs succès marquants. Une soirée sympathique, déglinguée et sans autre prétention que celle de célébrer une fructueuse amitié musicale franco-québécoise.
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