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Pierre Lapointe rêve en couleurs Guy Fournier - Le Journal de Montréal

Dimanche soir au gala de l’ADISQ, pendant que le ministre du Patrimoine opinait du bonnet, Pierre Lapointe, sans doute inspiré par son veston­­­ multicolore, rêvait en couleurs.

Avant d’avouer qu’il avait touché seulement 500 $ de Spotify pour un million d’écoutes de sa chanson Je déteste ma vie, il avait exhorté les gouvernements à imposer enfin les géants du web. « Il en va, a-t-il dit, de la survie de notre culture ». La salle l’a applaudi à tout rompre.

Si Pablo Rodriguez, l’actuel ministre du Patrimoine, a hoché tristement la tête, c’est qu’il sait trop comment il sera difficile d’imposer Spotify, Apple Music, Google Play Music et tous les autres agrégateurs en ligne. Les obliger à payer des redevances plus généreuses aux artistes sera encore plus difficile. Exiger qu’ils contribuent en plus à la création de musiques et de chansons québécoises tient de l’utopie.

RIEN QUE DES PINOTTES

Pourtant, Pierre Lapointe et ses semblables ont raison. Non seulement ils touchent des pinottes pour les millions d’écoutes de leurs œuvres, mais loin de s’améliorer, leurs conditions se détériorent. Plus l’écoute en ligne augmente­­­, plus la concurrence s’accentue entre les agrégateurs et plus ceux-ci diminuent leurs redevances aux ayants droit. Au bout du compte, ceux-ci doivent rémunérer les artistes selon les contrats qu’ils ont avec eux.

Lapointe a-t-il minimisé ses revenus, multiplié indûment l’écoute de sa chanson ou a-t-il négocié de mauvaises conditions avec ses producteurs ? À 500 $ pour un million d’écoutes, c’est .0005 $ par écoute. On est loin des .006 $ à .008 $ que Spotify et la plupart des agrégateurs prétendent payer.

Parmi les agrégateurs, Tidal, une espèce de coopérative d’artistes dont fait partie le groupe rock montréalais Arcade Fire, est le plus généreux. Les ayants droit y recevraient trois fois plus qu’avec Spotify. Malheureusement, Tidal n’a qu’un petit nombre d’abonnés, car ils paient deux à trois fois plus cher que les abonnés des autres agrégateurs.

L’EXEMPLE DE LA FRANCE

Le ministre Rodriguez avait raison d’être dubitatif, dimanche. Même s’il a réussi à convaincre le parti libéral d’inclure dans son programme électoral d’imposer les géants du web en plus de les forcer à contribuer à la création d’œuvres originales canadiennes, il sait trop bien que la partie est loin d’être gagnée.

On cite la France en exemple pour avoir eu l’audace de créer un nouveau droit d’auteur et le courage d’imposer les géants du web à raison de 3 % de leurs revenus français, mais elle n’est pas au bout de ses peines. En vertu du droit voisin, les géants du web doivent rémunérer les articles de journaux et de magazines qu’ils reproduisent.

Google et Facebook ont déclaré qu’ils ne paieront pas un sou noir aux éditeurs. Ils ont même trouvé une façon astucieuse de faire échec au droit voisin. Google ne mettra désormais en ligne que de courts extraits d’articles, ce que le droit voisin permet de faire gratuitement. Quant à Facebook, il supprimera de sa plateforme tous les liens qui renvoient vers des contenus de sites de presse. Ni vu ni connu.

S’il veut continuer de s’offrir des vêtements aussi extravagants, je suggère à Pierre Lapointe de ne pas trop compter sur Spotify, mais de miser plutôt sur son rôle de coach à La Voix.

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https://www.journaldemontreal.com/2019/10/29/pierre-lapointe--reve-en-couleurs

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