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50 ans plus tard, la pièce «Les Belles-soeurs» n'a rien perdu de sa pertinence

Il y a très exactement 50 ans, le 28 août 1968, le Théâtre du Rideau Vert présentait la première d'une pièce qui allait chambouler la culture québécoise: Les Belles-Soeurs.

Loin de prétendre qu'il avait de grandes ambitions pour sa toute première pièce, l'auteur Michel Tremblay soutient qu'il ne s'agissait que d'un simple exercice de style.

«Je voulais savoir si le joual pouvait être joué au théâtre. Aujourd'hui, je peux dire que je n'ai pas raté mon coup!», reconnaît-il en éclatant de son rire distinctif.

Avec son complice, le metteur en scène André Brassard, il n'espérait rien de plus que de présenter un bon spectacle.

«On a fait ça dans une espèce d'innocence et d'insouciance. C'était notre premier à tous les deux. On savait que la pièce avait une petite odeur de soufre parce que beaucoup de gens avaient refusé de la jouer et que ça se parlait de la vulgarité dans le milieu», se rappelle le dramaturge.

Pourtant, bien au-delà de l'anecdote d'une première pièce jouée en joual pour parler directement au «vrai monde» de la réalité de la vie sur le Plateau Mont-Royal, Les Belles-soeurs est devenue la pierre angulaire du théâtre québécois. Celle qui a ouvert la porte aux créations d'ici et qui est encore montée 50 ans plus tard.

«N'importe quelle pièce peut être réduite à son anecdote. Je pense que les sociétés ont beau changer, les êtres humains restent les mêmes. Si, sur scène, vous sentez des êtres humains qui vous parlent plutôt qu'un auteur, vous avez plus de chances d'être touchés», estime Michel Tremblay.

«Toute proportion gardée, on joue des pièces qui ont 2500 ans sans se poser de questions, mais quand c'est un texte québécois, après dix ans on se demande si ça a vieilli. Pourquoi ça vieillirait s'il y a de l'humanité?», demande-t-il.

Selon lui, ce réflexe vient peut-être du fait que l'universalité des Québécois est encore toute nouvelle. «C'est nouveau que nos textes dépassent les frontières. Pendant 200 ans, on nous a dit qu'on était des imbéciles et qu'on n'était pas capable de créer des choses intéressantes parce que la culture venait d'ailleurs», explique le dramaturge en soulignant que c'est grâce à Gratien Gélinas, Marcel Dubé et Françoise Loranger que les Québécois ont appris qu'ils pouvaient écrire leur propre culture.

Pour Denise Filiatrault, qui faisait partie de la distribution en 1968, l'explication de l'éternelle jeunesse des «Belles-Soeurs» est simple: «C'est parce qu'elle est très bonne! Ça s'adresse au vrai monde et les gens se reconnaissent. Quand je l'ai lue la première fois, j'ai pleuré, j'ai ri, j'ai dit, il faut absolument que ce soit joué», souligne l'actrice et metteure en scène qui se réjouissait d'être présente pour fêter 50 ans plus tard.

Encore aujourd'hui, Denise Filiatrault considère qu'il reste encore des belles-soeurs à Montréal et un peu partout au Québec. Selon elle, la pièce est toujours actuelle. «Ça fait rire et ça fait réfléchir. Elle contient tout ce qu'une pièce a besoin pour qu'elle marche fort et qu'elle marche encore», assure-t-elle.

Michel Tremblay insiste pour dire que l'année où la pièce a été écrite n'a aucune importance. «C'est juste quand c'est nous qu'on y pense. Jamais on ne penserait à ça devant une pièce de Tennessee Williams», note-t-il.

Une nouvelle production

Mardi soir à la Place des arts, à Montréal, on a souligné ce jubilé par le lancement d'une toute nouvelle production de la comédie musicale Belles-soeurs en présence de l'auteur Michel Tremblay et de dizaines de comédiennes ayant toutes été des belles-soeurs à travers les décennies.

Dans la nouvelle distribution, c'est Kathleen Fortin qui hérite du rôle principal de Germaine Lauzon. Elle sera notamment entourée de Sonia Vachon dans le rôle de Rose Ouimet et d'Eveline Gélinas dans celui de Pierrette Guérin.

Une habituée du répertoire de Tremblay, Kathleen Fortin ne cache pas que de chausser les souliers de Germaine Lauzon revête quelque chose de particulier.

«C'est sûr que Germaine, c'est un rôle mythique dans la dramaturgie québécoise. C'est un beau défi, un beau cadeau», souligne celle qui a déjà eu un avant-goût en remplaçant Marie-Thérèse Fortin dans une précédente version.

«Germaine Lauzon c'est le lead, mais la vedette, c'est la gang de femmes qui sont là», ajoute-t-elle. Pour l'actrice, ce tableau de 15 femmes en scène demeure une perle rare dans le théâtre contemporain et la pièce n'a pratiquement pas pris une ride.

«Ça résonne encore beaucoup aujourd'hui, on voit le chemin qu'on a parcouru depuis 50 ans en tant que femmes et le chemin qu'il nous reste à parcourir aussi», observe-t-elle.

La musique composée par Daniel Bélanger vient d'ailleurs offrir une cure de jouvence au texte, selon Mme Fortin.

Pour le metteur en scène René Richard Cyr, le plus beau dans l'aventure des Belles-soeurs, c'est qu'«on célèbre les 50 ans d'une oeuvre qu'on joue encore et qui va encore être jouée pour longtemps».

Un demi-siècle après avoir monté son tout premier spectacle au Théâtre du Rideau Vert, l'auteur Michel Tremblay se plaît toujours autant à redécouvrir ce que les autres ont fait de son texte.

«Ce que j'ai écrit, je le connais par cœur, je suis tanné! Mais les décors, les costumes, l'éclairage tout est différent et tout est joué de manière différente et ça, c'est passionnant», a-t-il commenté.

À compter du 27 septembre, la production part en tournée dans sept régions du Québec, dont les premières seront Gatineau, Montréal, Québec et Sherbrooke.

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https://quebec.huffingtonpost.ca/2018/08/29/les-belles-soeurs-50-ans-plus-tard_a_23511622/

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