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Partir en douceur dans la nuit - Le Journal de Montréal

C’était une soirée d’automne tirant sur l’hiver à Morin-Heights, à quelques kilomètres de Saint-Sauveur. La maison de Brigitte Bélanger a été construite au milieu de grands pins. Si on se laissait aller à rêver, on pouvait se sentir dans un décor de film avec la pluie glaciale frappant les grandes vitres de la verrière. 

C’est dans cette pièce, la favorite de Jean Pagé, que l’homme avait passé la dernière année de sa vie. Il l’aimait. Il y était bien. 

Pendant la soirée, les enfants et les amis très proches étaient venus le veiller. Il errait à la limite du conscient et de l’inconscience, son corps malade et épuisé luttant encore. Pour un dernier souffle de vie. 

Vers 23 heures, tout le monde est parti. Dans son lit, Jean ne semblait plus être conscient de ce qui se passait autour de lui. 

EN DOUCEUR 

Quand la porte s’est refermée, Brigitte est retournée dans la verrière. Elle n’entendait plus la pluie. 

La maison était silencieuse. Cléo, la chienne affectueuse que Mira avait confiée à Jean pour l’accompagner dans ses derniers mois, s’est couchée sur le plancher. Pour que son maître sente qu’elle était proche. Qu’elle veillait sur lui. 

Fatiguée, les traits marqués par les nuits sans sommeil, Brigitte s’est assise sur le lit. Sa main droite a pris la main de son amoureux. De l’homme qu’elle a accompagné pendant ces dernières années de maladie. Dans les rires et les pleurs. Toujours là. 

Puis, son autre main s’est posée dans les cheveux de son homme. Elle l’a regardé avec un amour infini dans le regard et doucement, tout doucement, elle s’est penchée sur son oreille : 

« Je t’aime Jean. Je vais toujours t’aimer. Mais si tu n’es plus capable, tu peux partir. T’en as assez fait pour tout ton monde. Tu t’es assez battu. Les enfants sont grands et moi, je vais être bien, je te le promets », lui a-t-elle chuchoté d’une voix bouleversée par l’amour. 

Elle se releva un petit peu. Pour voir son visage, pour voir ses yeux. Elle savourait ce moment qui résumait toute une vie. 

Elle sentait qu’elle avait eu la chance de lui parler, de lui chuchoter ce qu’elle voulait lui dire une dernière fois et que les heures, la pluie, la nuit lui avaient donné cette chance. 

Le visage du grand malade s’est détendu. Elle a senti sa main se relâcher dans la sienne. Et tout doucement, il est parti. Comme apaisé. 

UN DERNIER TOUR DE PISTE  

Le lendemain, hier, les médias se sont emparés de la nouvelle. Jean Pagé a fait la Une des bulletins de nouvelles. 

Les gens ont témoigné de leur respect et de leur affection pour ce communicateur hors pair. Le grand Jean a eu droit aux projecteurs et à la lumière une dernière fois. 

Lui qui avait passé sa vie à Sarajevo, en Espagne, partout dans le monde sous les projecteurs et devant les caméras des grands réseaux. 

Lui, la grande star de Radio-Canada et de La Soirée du hockey et l’animateur bon enfant de 110 % a reçu tous les hommages. 

Tous mérités. 

Mais il a choisi de partir seul avec sa Brigitte. Dans la verrière qu’il avait fait hiverniser pour en profiter. Dans une pièce qui sentait encore l’amour de ses enfants qui venaient d’y passer la soirée... 

J’écris et je pleure...

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