PARIS | Il rêvait de chanter jusqu'à cent ans la vie, l'amour, la nostalgie, le temps qui passe. Charles Aznavour, le dernier des géants de la chanson française et son inlassable ambassadeur à travers le monde, s'est éteint dans la nuit de dimanche à lundi à l'âge de 94 ans.
C'est dans les Alpilles, dans le sud-est de la France où il aimait tant se reposer, que Charles Aznavour s'est éteint, suscitant une vague de tristesse chez ses admirateurs de toutes générations.
« C'est un accompagnateur de nos vies. J'ai l'impression que j'ai survécu en entendant des chansons de Charles Aznavour... », a réagi Alain Souchon sur RTL.
« Le vrai boss vient de nous quitter. Un guide, un maître, je vous aime Charles. Dur de ne pas pleurer. Hasta pronto señor Champagne», a tweeté Benjamin Biolay.
« Définitivement en haut de l'affiche... Au revoir Monsieur Charles Aznavour », a pour sa part commenté DJ Snake, un des artistes français les plus courtisés à l'étranger.
Tel Benjamin Button, le personnage créé par Francis Scott Fitzgerald, né vieillard et qui vécut toute sa vie en rajeunissant avant de mourir nourrisson dans « L'étrange histoire de Benjamin Button », Aznavour semblait prendre un bain de jouvence ces dernières années à chaque tour de chant.
Avec toujours le même miracle: il débutait ses concerts la voix rouillée et le corps fragile, mais les concluait léger comme une plume et le pas dansant, devant son télésouffleur devenu indispensable.
Inépuisable, le chanteur aux plus de 70 ans de carrière avait repris la scène en septembre avec deux concerts au Japon et s'apprêtait à repartir en tournée cet automne avec plusieurs dates en France.
180 millions de disques vendus
Ces derniers mois pourtant, l'inusable avait dû annuler quelques représentations. D'abord en avril à Saint-Pétersbourg, victime d'un tour de reins. Puis en mai, en raison d'une fracture de l'humérus gauche, après une chute. Une accumulation de pépins qui le ramenaient subitement à sa condition de mortel.
« Je ne suis pas vieux, je suis âgé. Ce n'est pas pareil », se plaisait-il à nuancer, auprès de l'AFP. Une façon espiègle de défier le poids des années pour celui dont le couronnement artistique est venu assez tardivement, à 36 ans, le 12 décembre 1960 à l'Alhambra.
Ce soir-là, il donna le concert de la dernière chance devant le tout Paris ainsi que des critiques, qui ne croyaient pas en son talent scénique et raillaient sa voix. Et « l'enroué vers l'or » mit tout le monde d'accord avec sa performance habitée de « J'me voyais déjà », qui raconte les illusions perdues d'un artiste.
Jusqu'alors, Aznavour avait pourtant connu le succès avec « Parce que », « Le palais de nos chimères », « Sur ma vie », « Sa jeunesse ».
Il écrivait aussi pour les plus grands, Juliette Gréco, Gilbert Bécaud, Édith Piaf qui le soutint ardemment et fut un de ses « quatre points cardinaux avec Charles Trénet, Constantin Stanislavski et Maurice Chevalier ».
« Il a osé chanter l'amour comme on le ressent, comme on le fait, comme on le souffre », dit de lui Chevalier dans les pas duquel il a fini par marcher aux quatre coins du monde, devenant à son tour l'ambassadeur de la chanson française. Une renommée appuyée par ses 180 millions de disques vendus.
Le lait et le café
Pourtant rien ne fut acquis pour Shahnourh Varinag Aznavourian, né le 22 mai 1924 à Paris de parents arméniens.
« Quels sont mes handicaps? Ma voix, ma taille, mes gestes, mon manque de culture et d'instruction, ma franchise, mon manque de personnalité. Les professeurs m'ont déconseillé de chanter. Je chanterai pourtant, quitte à m'en déchirer la glotte », écrira-t-il dans son autobiographie « Aznavour par Aznavour » (1970).
Sa détermination, son talent et, comment les ignorer, ses tubes intemporels comme « La Bohème », « La Mamma », « Comme ils disent », « Mes emmerdes » permettront finalement à cet homme de taille modeste de renverser les montagnes, lui qui n'a jamais hésité à protéger les jeunes pousses, comme Johnny Hallyday à qui il fit cadeau de « Retiens la nuit ».
Même s'il n'avait plus sorti de grande chanson depuis une trentaine d'années, Aznavour a entretenu son mythe par la scène, dans les salles les plus prestigieuses du monde. Comme une revanche sur tous ceux qui ne lui prédisaient aucun avenir et qui « sont tous morts depuis longtemps, alors que moi... je suis encore là », cinglait-il.
« Je voulais surtout placer ce que je savais faire, c'est différent. J'ai fait de la danse classique, de la variété, du théâtre », disait-il.
Et du cinéma: en quelque 80 films, il tourna avec François Truffaut (« Tirer sur le pianiste »), Volker Schlöndorff (« Le tambour »), Claude Chabrol (« Les fantômes du chapelier »)...
Où qu'il fût, cet artiste concerné par le drame des migrants rappelait toujours son attachement à ses deux pays. « Je suis Français et Arménien, les deux sont inséparables comme le lait et le café », résumait-il l'an passé en recevant son étoile sur le « Walk of fame » à Hollywood.
À présent, ces deux nations, mais aussi le monde pleurent un de leurs plus grands artistes.
Le monde réagit au décès d'une légende
Emmanuel Macron a rendu hommage à Charles Aznavour, décédé lundi à 94 ans, affirmant que « ses chefs d'oeuvre, son timbre, son rayonnement unique lui survivront longtemps ».
« Profondément français, attaché viscéralement à ses racines arméniennes, reconnu dans le monde entier, Charles Aznavour aura accompagné les joies et les peines de trois générations », a écrit sur son compte Twitter le chef de l'État.
L'ancienne actrice Brigitte Bardot a salué en Charles Aznavour « notre As des ambassadeurs du talent dans le monde », dans un texte transmis lundi à l'AFP.
« Il était notre As immortel. Notre As des poètes. Notre As de la chanson française. Notre As de la popularité. Notre As des ambassadeurs du talent dans le monde. Il restera notre «As... navour» à jamais », a écrit Brigitte Bardot depuis Saint-Tropez.
La mort du chanteur et acteur Charles Aznavour est une « perte énorme pour le monde entier », a déclaré le premier ministre arménien Nikol Pachinian, rendant hommage à « un fils exceptionnel du peuple arménien ».
« Il est difficile de croire qu'une personne qui a créé toute une époque, qui a créé toute une histoire, l'amour, qui a servi son peuple, une personne qui a pendant 80 ans émerveillé et réchauffé le coeur de dizaines, de centaines de millions de gens, n'est plus avec nous aujourd'hui », a indiqué M. Pachinian sur Facebook.
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